L’expérience de décentralisation administrative et territoriale y est introduite pour la première fois en 1872 avec la création des communes de Saint-Louis et de Gorée le 10 Août 1872 ; les communes de Rufisque et de Dakar ont été créées respectivement en 1880 et 1887. Ces quatre communes étaient de plein exercice. Parallèlement, des collectivités locales étaient créées en 1904 sous l’appellation de communes mixtes. Leurs organes représentatifs étaient un administrateur-maire (chef de la circonscription) et une commission municipale dont les membres étaient nommés.
La loi portant réorganisation municipale en Afrique Occidentale Française (AOF) fut votée le 18 Novembre 1955. Elle instituait une nouvelle forme de commune : la commune de moyen exercice, dont le conseil municipal était élu et le maire, un fonctionnaire nommé. En accédant à la souveraineté internationale, le Sénégal comptait 34 communes, toutes de plein exercice. Ce nombre sera réduit d’une unité avec le rattachement de Gorée à Dakar en 1961. D’autres communes seront créées, par la suite, entre 1966,1990 et en 2002. Plusieurs réformes ont été mises en œuvre par l’Etat, en vue de consolider la décentralisation.
On distingue trois grandes étapes.
De 1960 à 1990 : la phase institutionnelle de la réforme
Indépendant, le Sénégal a opté pour un régime municipal à deux statuts : la commune à statut spécial et la commune de droit commun. En 1964, la loi n° 64-02 du 19 Janvier institue pour la première fois un régime municipal spécial dérogeant au droit commun. Il s’agissait de la commune de Dakar que devaient suivre ceux des chefs lieu de Région. La commune de droit commun qui est l’autre catégorie de commune est régie par le code de l’administration communale (loi n° 66-64 du 30 Juin 1966) qui précise l’organisation, le fonctionnement et les missions des collectivités locales décentralisées.
L’innovation majeure dans la politique sénégalaise de décentralisation administrative réside dans la création en 1972 des collectivités locales en milieu rural. Ainsi, avec la réforme de l’administration territoriale et locale instituée par la loi 72-25 du 19 Avril 1972, 320 communautés rurales ont progressivement vu le jour. Cependant, les fonctions d’administrateur de crédits, et d’ordonnateurs du budget communautaire sont confiées, à titre transitoire, au Sous-Préfet.
De 1990-1996 : la phase d’approfondissement de la décentralisation
Après une première phase consacrée à son montage institutionnel, la politique de décentralisation connaît une seconde mutation en 1990. La loi n° 90-35 du 8 Octobre 1990 supprime le statut de commune spécial pour le reverser dans le droit commun. Toutes les communes sont désormais administrées par un maire élu et non plus par un fonctionnaire nommé par les pouvoirs publics.
Dans la même mouvance, la loi n° 90-37 du 8 octobre 1990 modifiant la loi n°72-25 du 19 Avril 1972 transfère la gestion des Communautés Rurales du Sous-Préfet au Président du Conseil Rural qui devient, à l’instar du maire, ordonnateur du budget communautaire.
Dès 1992, un projet de loi qui érigerait la Région, jusque là simple circonscription administrative, en collectivité territoriale décentralisée dotée de la personnalité juridique et de l’autonomie financière et qui verrait le transfert à tous les niveaux de collectivités locales des compétences importantes, voit le jour.
Décentralisation et réforme institutionnelle de la Région : phase d’expérimentation de la réforme
La troisième phase de la politique de décentralisation, dont la régionalisation constitue une dominante, repose sur les principes suivants :
un statut unique pour toutes les Régions ;
un équilibre entre la décentralisation et la déconcentration ;
une meilleure répartition des centres de décision dans le cadre des ressources disponibles ;
un contrôle aménagé a posteriori ;
l’unité nationale, l’intangibilité des frontières et l’intégrité territoriale. Ces principes visent à clarifier les rapports entre les trois ordres de collectivités locales fondés sur l’égalité tout en tenant compte de la spécificité de chacune d’elle à assurer l’ancrage de la présence administrative dans la région et le développement de l’activité économique régionale, par le rapprochement des centres de décision, la confiance en la capacité de gestion des populations et la valorisation des particularismes locaux dans le cadre de l’unité nationale.
Dés lors, les objectifs de la réforme apparaissent clairement. Il s’agit entre autres d’assurer le développement économique, social, et culturel de chaque région ; d’installer une administration proche des usagers ; d’instituer des régions dynamiques dans le cadre d’un Etat unitaire.
Au terme de ce long parcours, le Sénégal compte 442 collectivités locales : 322 communautés rurales, 110 communes dont 43 communes d’arrondissement dans les villes de la région de Dakar et 11 régions. En outre, d’importantes compétences ont été transférées aux collectivités locales en 1996, en plus de leurs compétences générales dans le développement économique et social. C’est la loi 96-07 du 22 Mars 1996 qui détermine les compétences transférées en distinguant celles qui sont dévolues aux régions, aux communes et aux communautés rurales.
La première génération de compétences ainsi transférée concerne les domaines ci-après :
domaines
environnement et gestion des ressources naturelles
santé, population et action sociale
jeunesse, sports et loisirs
culture
éducation
planification
aménagement du territoire
urbanisme et habitat.
L’importance de ce transfert de compétences réside ainsi dans le fait qu’il permet aux responsables locaux d’intervenir dans des matières touchant directement le vécu quotidien des populations, donc de s’impliquer de manière significative dans la recherche du développement local.
C’est par conséquent une politique de responsabilisation des acteurs locaux qui se trouvent désormais soumis à l’obligation de présenter des résultats au moment de l’évaluation.
Toutefois, le constat est que le transfert de compétences vers les collectivités territoriales sénégalaises ne s’est pas accompagné d’un transfert suffisant des ressources de l’Etat. Les responsables de ces collectivités locales et plus particulièrement des Communautés Rurales mais aussi et surtout ceux des Régions, estiment qu’ils ne disposent pas d’assez de ressources pour faire face à leurs anciennes et nouvelles missions.
Conscient de cette situation, l’Etat a aménagé ses textes pour faciliter l’acquisition de recettes additionnelles via la COOPERATION DECENTRALISEE.
Ainsi, les collectivités locales qui n’ont pas une bonne viabilité parce que dépourvues de ressources propres (région et communautés rurales) vont se tourner vers l’apport extérieur pour assurer leur lourde mission de développement local.